Le président Macron accompagné de sa femme au Touquet, où le couple a voté. Philippe Wojazer/Reuters
Le résultat du scrutin signe-t-il la fin des partis traditionnels
La grande question sur le plan démocratique est de savoir où sera l’opposition. Il est difficile de répondre à cette question, car une partie des Républicains souhaitent travailler avec En Marche !, lorsque l’occasion se présentera, alors que l’autre partie n’envisage pas du tout de le faire. On peut faire la même remarque pour ce qui restera du groupe socialiste. Pour l’instant, l’opposition la plus forte vient du Front national et de la France insoumise, or ce seront les deux partis les moins bien représentés à l’Assemblée nationale
Après un résultat historique à la présidentielle, le Front national a dégringolé ces dernières semaines. Et si ces législatives ont permis de consolider la place du FN, il n’a néanmoins pas atteint les succès escomptés.Comment expliquez-vous cela
La très mauvaise prestation de Marine Le Pen lors du débat du second tour a déconcerté certains électeurs du Front national. Cela est lié au fait qu’il semblerait qu’il y ait des problèmes programmatiques et même idéologiques qui n’ont pas été réglés ces dernières années. Derrière cet apparent succès, il y a de vrais clivages et de réelles interrogations, notamment par rapport à l’euro. Ensuite, il y a des éléments plus institutionnels et structurels qui justifient ce désenchantement. Un bon score à la présidentielle n’est pas nouveau pour le FN. Or, à chaque fois, y compris en 2012 où Marine Le Pen avait fait un bon score, il y a eu un contrecoup aux législatives pour ce parti. Cela est dû au mode de scrutin d’une part, mais surtout au fait que le FN est structuré autour d’une personnalité forte, Jean-Marie Le Pen ou Marine Le Pen, et qu’on ne retrouve pas du tout cela dans les circonscriptions. Les éligibles FN ne sont pas assez installés dans le paysage, n’ont que peu de réseaux, donc l’effet charisme au niveau national n’est pas du tout reproduit au niveau des circonscriptions
Existe-t-il un précédent d’une telle mainmise d’un seul parti politique sur l’Assemblée nationale
En lisant certains journaux qui vont assez vite dans l’analyse, on pourrait dire oui, mais selon moi non. Lorsqu’il y a eu une majorité pléthorique de droite comme en 1993, ou en 1958, lors de l’arrivée du général de Gaulle au pouvoir, cette majorité n’était pas homogène, puisque dans les deux cas il y avait d’une part un parti de droite gaulliste ou néogaulliste et d’autre part un parti de centre-droit. Ce n’était pas un seul parti qui obtenait 300 sièges ou plus. Il y avait des rivalités entre les deux partis, donc c’était une majorité certes, mais pas une majorité monochrome ou soumise à un seul homme. Certes, le Modem est allié à En Marche !, mais il n’obtient qu’une quarantaine de sièges. Qu’un seul parti aussi récent obtienne une telle majorité est tout à fait inédit
Qu’est-ce que cela dit de la France
Cela révèle la perte totale de confiance vis-à-vis des anciens partis, mais au-delà, du politique. Cela révèle aussi le rejet des fonctionnements des partis et de notre démocratie. Et ça révèle aussi des attentes assez importantes vis-à-vis de la formation qui en bénéficie. L’ampleur de la victoire d’En Marche ! est à mon avis quelque chose qui n’était pas anticipé par les intéressés il y a quelques mois. Cela impliquera de répondre à ces attentes qui sont fortes et de ne pas décevoir, ce en quoi le retour de bâton sera tout aussi disproportionné que le succès