Prise dans la ville de Sar-e Pol-e Zahab, située dans la province de Kermanshah (ouest), la plus frappée par le séisme du 12 novembre, cette photo a suscité une vague de contestation contre les programmes de logement de Mahmoud Ahmadinejad. Source : Aftab
Depuis le tremblement de terre d’une magnitude de 7,3, survenu dimanche 12 novembre dans l’ouest de l’Iran, ayant fait, selon le dernier bilan, 432 victimes, une photo est au cœur de tous les débats. Le cliché montre deux immeubles, dans la ville de Sar-e Pol-e Zahab, d’une population de 90 000, située sur la frontière irakienne, proche de l’épicentre des secousses. L’un est resté intact alors que les murs de l’autre sont complètement effondrés. Ce dernier a été construit dans le cadre du projet phare de logements sociaux à très bas prix, baptisé « Mehr », initié et mené par le dernier président, le populiste Mahmoud Ahmadinejad (2005-2013).
Le bâtiment effondré sur ce cliché est loin d’être un cas isolé. Le vice-président iranien, Eshagh Jahangiri, en visite dans cette ville, a déclaré au lendemain du séisme que la plupart des bâtiments détruits appartenaient au projet de Mehr, et a demandé au ministre des routes et du développement urbain de mener une enquête.
Même son de cloche de la part du président Hassan Rohani, en visite dans les zones sinistrées, mardi 14 novembre. « Nous avons vu des logements du Mehr, à côté d’autres maisons. Les maisons n’ont pas été détruites alors que les logements du Mehr, si », a ainsi déclaré Hassan Rohani. Depuis, une grande vague de critiques s’est formée sur la Toile, mais aussi dans la presse iranienne, contre le projet Mehr, pour lequel les normes de construction n’auraient pas été respectées. Le chef de l’Etat a promis aux sinistrés de traduire en justice les responsables.
Parmi les victimes de ce tremblement de terre, le plus puissant dans l’ouest de l’Iran, 70% sont des habitants de Sar-e Pol-e Zahab, ville en très grande partie détruite pendant la guerre Iran-Irak (1980-1988). Selon les officiels, au total, 70 000 personnes sont actuellement sans abri dans la province de Kermanshah.
Depuis l’arrivée au pouvoir de Hassan Rohani, en août 2013, le projet Mehr, dont le but a été de construire deux millions de logements pour les Iraniens à faibles revenus, a été stoppé. Les adversaires de M. Rohani rejettent les accusations contre la mauvaise qualité des logements du Mehr et l’attaquent pour y avoir mis un terme. Pour défendre le Mehr, ils évoquent notamment le cas d’un hôpital, situé à Eslamabad-e Gharb, qui a également été complètement détruit, alors que sa construction date de 1991. Ce qui prouve, selon ces voix critiques du président, que le non-respect des normes ne se limite pas au projet Mehr.
La fragilité de ces complexes d’habitation n’est pas le seul problème du projet Mehr. Sur différents sites d’information, consacrés à la province de Kermanshah, des articles évoquaient, bien avant le séisme, des difficultés rencontrées par les habitants des complexes du Mehr dans Sar-e Pol-e Zahab, notamment l’absence de réseaux de distribution d’eau et d’électricité, les dysfonctionnements des ascenseurs, le manque d’aires de jeux pour enfants et le mauvais aménagement des voies publiques. En février, déjà, tous les ascenseurs de tous les complexes du Mehr dans cette ville avaient été fermés, en raison des « craintes pour la vie des habitants ».