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Belles à mourir

Belles à mourir

IMPRESSION
08/06/2017

 

Il ne s’agit pas ici de rédiger un réquisitoire à charge contre le célèbre chirurgien plastique dans la clinique duquel est morte, il y a quelques jours, une jeune femme venue au Liban se « refaire une beauté ». On voudrait croire qu’une enquête sérieuse est en cours et que la justice agira en fonction des conclusions

Mais ce drame jette une lumière particulièrement glauque sur les canons de beauté que cherchent à incarner depuis quelques années un certain nombre de Libanaises et de Moyen-Orientales en général. Il suffit de jeter un coup d’œil sur les innombrables vidéos et documentaires qui circulent sur YouTube pour mesurer l’étendue du phénomène et le succès dudit praticien qui en est le héros

Depuis au moins cinq ans, il est sur toutes les télévisions locales, sans compter son interminable film publicitaire diffusé à bord des avions de la MEA ni, en guise d’apothéose, le bout de reportage récent et plutôt grinçant réalisé par M6 – 66 Minutes, 15 mai 2017

Quand Nader Saab y présente ses clientes, il ne chipote pas dans les superlatifs : « L’épouse de l’homme le plus riche, la femme la plus belle », etc. Dans un épisode tourné en 2012 de l’émission Khedni maak (Emmène-moi) produite par OTV, on relève une banalisation systématique de l’acte chirurgical, étayée par des critères de temps : dix minutes pour refaire les seins, tant de minutes pour le nez, tant pour la graisse abdominale. On relève aussi une petite phrase qui en dit long sur l’esprit qui domine ces pratiques : les maris sont invités à assister aux opérations et à donner leur avis sur la taille des prothèses mammaires : –  parce que ce sont eux, après tout, les principaux bénéficiaires du résultat
Dans ce documentaire auquel le présentateur prétend donner une dimension humoristique à force de mimiques ridicules et potentiellement dangereuses (il s’amuse entre autres à coudre au catgut sa blouse à celle de Nader Saab pendant que ce dernier, en plein bloc opératoire, recoud lui-même une patiente), le praticien souligne en substance que de nos jours, quand une personne ne répond pas à certains critères de beauté, sa vie est carrément vouée à l’échec. Dans sa clinique clinquante de faux luxe, envahie de meubles et d’objets ostentatoires, dominée par des tonalités de bois sombre et d’or, l’homme affirme que le premier coup de scalpel est « jouissif » et parle de ses –  malades

Le mot interpelle. De quelle sorte de maladie souffrent ces femmes, sinon d’un manque de confiance tragique dû à une culture qui leur signale clairement que leur corps ne leur appartient pas ? Leur corps semble un trophée à la portée du premier mâle enrichi qui considère toute constitution soumise à la gravité et au passage du temps indigne de sa fortune. Voué à être le support d’une esthétique du déni, leur corps est un champ de bataille de plus contre la nature

Ailleurs, des créateurs inspirés recherchent désormais, pour véhiculer une image intéressante de leur travail, des visages et des corps marqués par ces imperfections qui intriguent, révèlent un caractère, suggèrent une histoire. À l’heure où la mode célèbre la différence, notre seule ambition est de ressembler. Mais à quoi

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